Après Oreste à Mossoul, réalisé en partie dans les ruines de l’ancien fief de l’État Islamique, Milo Rau et son équipe nous embarquent au nord du Brésil, dans l’état du Parà, pour y déployer sa version d’Antigone. Dans cette région où la forêt Amazonienne est chaque jour ravagée au profit des grands groupes de l’industrie agroalimentaire, le metteur en scène suisse a rassemblé des activistes du mouvement des sans-terre, des indigènes, ainsi que des acteurs professionnels brésiliens et européens autour d’un projet basé sur la tragédie de Sophocle. Le rôle-titre est porté par l’actrice indigène Kay Sara et le chœur antique compte des survivants d’un des plus grands massacres perpétrés par le gouvernement brésilien contre les paysans. Avec cette façon bien à lui de déployer le théâtre en miroir du réel et de tisser l’intime et l’universel, mêlant plans filmés et scènes jouées en direct, Milo Rau, directeur du Théâtre national de Gant (NTGent) depuis 2018 et auteur d’un théâtre de plus en plus engagé, nous alerte sur la violence d’un État qui place la propriété privée au-dessus du droit ancestral à la terre.