Pierre Boulez (1925 – 2016) est l’objet de nombreux malentendus. Figure principale de l’avant-garde française après-guerre, il peut, certes, être perçu comme un artiste de rupture. Il revendiqua souvent lui-même à ses débuts, le principe de la « table rase ». Il fut, toutefois, surtout un grand continuateur, rénovant les canons des musiques dites classiques, fondant de nouvelles institutions (l’IRCAM, l’Ensemble intercontemporain et, indirectement, la Philharmonie de Paris) tandis qu’il actualisait le logiciel des anciennes dont il prenait la direction comme chef d’orchestre, à Londres, New York, ou comme invité à Bayreuth et à l’Opéra de Paris. Son œuvre s’inscrit ainsi dans une histoire de la musique française, fortement inspirée par Debussy, dont l’impressionnisme des structures, avec ses précipités et ses dissolutions du mouvement et des formes, se retrouve souvent dans ses propres partitions. Elle inspire également des courants esthétiques très différents, dont le mouvement spectral prolonge le travail de Boulez sur la structure du son. Gérard Grisey en fut l’un des représentants les plus poétiques. Loin d’une certaine image de cérébralité, l’Ensemble intercontemporain illustre ici le versant le plus imagé et sensoriel de son créateur.